Donner, Partager un repas solidaire avec “la Cuisine des migrants”

Le culte de l’accomplissement personnel, le consumérisme et les soucis quotidiens font perdre de plus en plus le sens de l’humain, la charité dans nos sociétés actuelles. A ce sujet, les réseaux sociaux montrent davantage d’engagement des internautes en ligne pour des causes caritatives et peu d’action sur le terrain. L’émoi sur le documentaire de Cnn révélant l’esclavage des noirs en Lybie en est une illustration. Loin des propagandes politiques et médiatiques, le nombre de personnes en situation précaire ne cesse de se décupler depuis les récents flux migratoires. Migrants, sans domicile fixe, sans papiers, difficile de dénombrer  les populations pour lesquelles manger à sa faim ou avoir un logement décent est un périple quotidien.

Face à ces difficultés, l’engagement de nombreuses associations mais aussi l’émergence de collectifs civils comme à la Cuisine des migrants est louable. À défaut de pouvoir apporter pour l’heure un soutien direct aux populations susmentionnées, Okedjenou a participé Mercredi 2 Mai 2018 à la Maraude de thé organisée par la cuisine des migrants. L’occasion est pour nous de vous montrer en quelques lignes l’organisation, le fonctionnement de ce collectif de bénévoles : la Cuisine des Migrants.

Aux origines

Créé depuis le printemps 2016, la cuisine des migrants est une action bénévole de personnes vivant en France, destinée à procurer aux migrants un soutien en mettant à disposition des plats en journée, des boissons et petits encas plusieurs fois par semaine. Qu’ils soient en numéraire, en service ou en nature, les dons sont destinés à la cuisine des migrants et les donateurs peuvent participer à la préparation des repas ou au service des plats.S

Cuisine des migrants logo

La “Cuisine des migrants” au quotidien

Le collectif ne disposant pas de local fixe, faute de moyens et structure juridique, la cuisine est souvent amenée à changer d’adresse. Des mamans s’affairent la matinée à préparer des repas  (environ 300 repas) avec beaucoup d’amour du lundi au vendredi. En soirée, d’autres associations prennent le relais, le service est donc restreint à une maraude de thé accompagné de petits gâteaux du lundi au jeudi. La cuisine des migrants dispose de peu de moyens et repose dans la majeure partie des cas sur des dons effectués par des particuliers.

Suite à un post Facebook, je contacte les administrateurs et me rends sur les lieux de la cuisine de Migrants à 19h. Je suis accueillie par trois hommes assurant la permanence de la Cuisine. Quatre autres jeunes gens nous rejoignent également pour leurs premières maraudes de thé : Margaux, Céline, Benoit et Marc.

Curieux, nous enchaînons les questions à nos hôtes en vue de comprendre le but et le fonctionnement de l’association. Karim* nous explique qu’il s’agit avant tout d’une initiative « humaine ». Avoir un repas par jour permet de mieux supporter les difficultés du quotidien en attendant une hypothétique éventuelle régularisation administrative et une intégration dans le monde du travail. Occupé à faire la vaisselle, Omar renchérit « Celui qui n’a pas faim a une « raison » de moins d’aller voler ». Il nous rappelle qu’il est lui-même au chômage depuis quelques mois. Il reste sensible tout de même à la souffrance des autres. Il est aidé dans la tâche par d’autres amis qui alternent heures de travail et heures de bénévolat.L

Ziyad, un de nos hôtes nous explique également qu’il est possible aussi d’aider au service du midi (cuisine et distribution des plats). Après avoir lu une affiche mentionnant une demande d’aide de l’association, Céline, demande à Ziyad si l’association peut compter sur le soutien des pouvoirs publics. Ce dernier explique que l’association n’est pas  enregistrée juridiquement par souci d’indépendance. D’ailleurs, les initiatives de la Cuisine des migrants sont jugées parfois comme stimulatrices des regroupements à la Porte de la Chapelle. A cela Karim répond : « Nous n’avons pas amené ces populations ici. Nous les y avons trouvé. La Cuisine des Migrants les aide juste à ne pas mourir de faim. Qu’on le veuille ou pas, ce quartier autrefois Sri-Lankais, devient Soudanais, Afghan… ».

A la question de savoir qui met à disposition le local de la cuisine, nous comprenons qu’il est utilisé pour la circonstance en attendant le démarrage de travaux pour une opération immobilière très prochainement.  Il faut donc trouver urgemment un nouveau local. Pour l’heure, les recherches sont infructueuses.

a cuisine des migrants -secours catholique  – secours islamiquecuisine migrant

Le service

Trève de bavardages ! Une voix sage nous rappelle qu’il faut s’activer. Nous commençons aussitôt la préparation du service. Avec mes nouveaux compagnons, nous nous affairons à préparer le thé dans de grandes marmites et à couper des tranches de gâteaux. Karim prépare également du café avec et sans sucre. Il s’est lié d’amitié avec plusieurs réfugiés et connait le régime alimentaire de certains personnellement. Nous transvasons ensuite les boissons dans de grands thermos et les gâteaux dans un carton dédié. L’association ne disposant pas de voitures, tous les aliments sont transportés avec un caddie et apportés sur les lieux de regroupement de nos convives près de Porte de la Chapelle.

thé migrant

Sur le chemin, je discute avec Margaux. Elle est musicienne et effectue son service civique auprès de l’association «la ressourcerie créative», organisme œuvrant dans l’économie solidaire. En marchant, nous sommes hélés par un passant. Son allure et son odeur corporelle laissent imaginer la rudesse de son quotidien. Omar lui sert un verre de thé bien chaud et deux tranches de gâteaux. Il demande également à dîner. Malheureusement, le service du soir n’inclut pas de repas. Omar lui indique une autre rue à quelque pas du lieu ou d’autres associations servent un dîner/souper.

Arrivés aux abords de la Porte de la Chapelle, nous arrêtons le chariot et commençons le service. Rapidement, de jeunes gens nous abordent. Il est 20 h et quelques cacahuètes. Je m’occupe de la distribution des gâteaux. Certains me demandent trois parts, d’autre deux. Etant « habituée » au service des plats lors des grandes cérémonies de famille, j’hésite à donner plus de parts. En effet, à 300 mètres du lieu de service, des jeunes gens sont sous des tentes et ne sont pas encore informés de la maraude de thé. Il serait dommage qu’à leur arrivée nous soyons à court de pâtisseries.

Entre deux tranches de gâteaux à partager, nous échangeons avec nos convives. Ils sont pour la plupart jeunes, en provenance de l’Afghanistan, de l’Irak, du Soudan … et principalement des hommes. Tout sourire malgré la fatigue qui se lit dans leurs yeux, ils boivent le thé brûlant, parfois d’un trait. Certains nous renvoient de bénédictions, d’autres reviennent pour un énième service.

Cuisine

L’un d’entre eux se propose de m’initier à la danse orientale. Il est grand, le teint hâlé, les cheveux bouclés, le sourire radieux. N’étant pas célibataire 😉 ,  je ne vous dirai pas qu’il est beau, je dirai juste que je ne suis pas la seule demoiselle à avoir remarquer ces traits 🙂 🙂 . Le temps se faisant malheureusement court, je retiens son prénom dans un creux de ma tête et je lui promets de répondre à son invitation la prochaine fois (Quand ?!).

Au fil des discussions, Céline et moi sommes agréablement surpris par Halim, un jeune homme Irakien. En seulement deux mois d’apprentissage de la langue Française, il s’exprime plutôt bien et arrive à faire la causette avec nous.  Je sors de mes longues discussions quand Margaux m’interpelle. Où se trouve la carafe de café sans sucre ? Erreur de débutants ! Nous l’avons servi sans garder une tasse pour Halim. C’est pourtant pour lui que Karim en avait préparé. Qui  a bien pu servir le café sans sucre ?? On ne saura pas mais la leçon sera retenue. Confondus en excuses, nous continuons le service jusqu’à la fin.

Il est environ 22h. La route est longue et je ne suis pas Parisienne. Comme « une voleuse », dès que les dernières gouttes du dernier thermos tombent dans le verre en plastique que tient Margaux, je demande la route (j’informe de mon départ). Céline me rejoint. Nous débriefons sur ces précieux moments en promettant d’être les plus fidèles disciples de la « Cuisine des migrants ».

Comment aider ?

  1. Il est possible de faire des dons en nature  au 73 rue Philippe de Girard paris 18e  ( Riz, légumes secs, thés, biscuits,  cuillères et gobelets en plastique, bouteille de gaz … ). Pour information, il est préférable de donner les mêmes produits en grandes quantités que plusieurs variétés de produits en petites quantités. Au besoin, contacter l’association par ici ou au numéro suivant : 06 46 24 61 54 .
  2. Les dons en ligne sont  également possibles via la cagnotte https://www.lepotcommun.fr/pot/wigl23p3
  3. Le temps reste également un don précieux et inestimable de nous, de notre personne.  Contacter l’association en vue de proposer votre aide pour les repas ou pour la maraude.

Je termine ce billet en me rappelant l’enseignement reçu à la fête de l’Ascension : « Le consumérisme, c’est de l’art de consumer en consommant. C’est chercher la pleine satisfaction dans ce qui est éphémère. ». Une fois qu’on le comprend, on sait qu’il faut peu pour réchauffer un cœur, procurer du bonheur. Les miettes des uns font souvent les festins des autres. Le plus important est de donner avec le cœur. Et vous, avez-vous des initiatives caritatives à partager avec Okedjenou ?  Que pensez-vous de la Cuisine des Migrants? 

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